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Par demhaitam le 15 Juin 2008 à 04:20
La fuite en avant
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Ehoud Olmert
LES ALLEMANDS parlent de "die Flucht nach vorne" la fuite en avant. Quand la situation est sans espoir, attaquez ! Au lieu de battre en retraite, avancez ! Quand il ny a plus dissue, foncez ! <o:p></o:p><o:p></o:p>
Cette méthode fut couronnée de succès en 1948. À la fin du mois de mai, larmée égyptienne avançait sur Tel Aviv. Nous, un très, très léger cordon de soldats étions tout ce qui restait pour lui barrer la route. Nous avons donc attaqué. Encore et encore. Nous avons subi de lourdes pertes. Mais nous avons stoppé lavance égyptienne. <o:p></o:p>
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Aujourd'hui, Ehoud Olmert applique la même méthode. Sa situation est désespérée. La plupart des gens en Israël sont convaincus quil a reçu de substantiels pots-de-vin sous la forme denveloppes bourrées de dollars. Le procureur général est susceptible de le mettre en accusation dun moment à lautre, et cela lobligera à démissionner. <o:p></o:p>
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Et cest alors, au moment le plus critique, juste avant que ne soient révélés les détails les plus scabreux, quun communiqué commun est publié simultanément à Jérusalem, à Damas et à Ankara annonçant lengagement de négociations de paix entre Israël et la Syrie, avec la médiation de la Turquie. Les entretiens vont se dérouler sur la base des principes de la conférence de Madrid en 1991, ce qui implique la restitution complète des Hauteurs du Golan. <o:p></o:p>
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Super !!!<o:p></o:p>
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EN CELA aussi Olmert est le digne élève de son prédécesseur et mentor Ariel Sharon. <o:p></o:p>
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Sharon était plongé jusquau cou dans des affaires de corruption. Dans lune delles, dite "laffaire de lîle grecque", le millionnaire israélien David Appel a versé des sommes considérables au fils de Sharon, un novice, pour des activités de "conseil". Á lépoque aussi, il semblait que le procureur général ne pouvait pas éviter de prononcer une mise en accusation. <o:p></o:p>
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La réponse de Sharon fut simplement géniale : la séparation. La séparation davec la bande de Gaza. La séparation davec le procureur général. <o:p></o:p>
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Ce fut une opération gigantesque. Dans une mise en scène mélodramatique minutieusement orchestrée, les colonies de Gush Katif furent démantelées. Avec plusieurs divisions de larmée, toutes les forces de police cette même police qui était supposée enquêter sur les affaires de la famille Sharon ont été mobilisées pour une entreprise nationale à couper le souffle. Le camp de la paix a naturellement apporté son soutien à lévacuation des colonies. Les affaires de corruption furent presque oubliées. <o:p></o:p>
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La séparation, qui fut réalisée sans la moindre concertation avec les Palestiniens, a transformé la totalité de la bande de Gaza en une bombe à retardement, et cest à Ehoud Olmert de négocier maintenant un cessez-le-feu. Pour Sharon, cependant, toute lopération fut une réussite. Sil navait pas été victime dune attaque, il serait encore Premier ministre aujourdhui. <o:p></o:p>
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Olmert na pas oublié la leçon. <o:p></o:p>
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IL SE PEUT QUE DES ESTHÈTES soient choqués. Nous ne devrions pas cautionner une aussi mauvaise farce ! Nous ne pouvons pas approuver une paix conçue dans le péché ! <o:p></o:p>
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Peut-être mon sens esthétique est-il émoussé. Parce que je suis prêt à accepter la paix même dun dirigeant complètement corrompu, même de Satan en personne. Si la corruption dun dirigeant le conduit à faire quelque chose qui sauvera la vie de centaines et de milliers dêtres humains de part et dautre, alors cela me convient. Le philosophe Friedrich Hegel na-t-il pas parlé de "ruse de la raison" ? <o:p></o:p>
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La Bible raconte quà lépoque où larmée de Damas assiégeait Samarie, la capitale du royaume dIsraël, quatre lépreux apportèrent la nouvelle que lennemi sétait retiré (2, Rois, 7). La poétesse juive Rachel écrivit, évoquant cette histoire, quelle nétait pas disposée à accueillir de bonnes nouvelles de la part de lépreux. Eh bien, moi si. <o:p></o:p>
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La sagesse commune considère que, pour faire la paix, on a besoin dun dirigeant fort. Maintenant, il semble que le contraire marche aussi : quun dirigeant faible, presque submergé dennuis, dont les fonctions pourraient prendre fin brutalement à tout moment et dont la coalition repose sur des pieds dargile, un dirigeant qui na rien à perdre, lui aussi est capable de tout risquer pour faire la paix.<o:p></o:p>
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LE CHEMIN peut, à partir de là, aller dans plusieurs directions possibles. <o:p></o:p>
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Première possibilité c'est du « spin » (jouer la montre) un terme américain qui est devenu le deuxième prénom dOlmert. Il se contentera détirer les négociations comme un chewing-gum, comme il la fait avec les Palestiniens, et attendra que la tempête se calme. <o:p></o:p>
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Il lui sera difficile dagir ainsi du fait que la Turquie est maintenant un partenaire dans le jeu. Même Olmert comprend que ce serait pure folie que de contrarier les Turcs qui risquent ici leur prestige national. La Turquie est un partenaire particulièrement important pour assurer notre sécurité. <o:p></o:p>
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Quoiqu'il en résulte, l'accord d'Olmert de conduire des négociations fondées sur le fait de rendre le Golan est un important pas en avant. Venant à la suite des précédents engagements pris par Yitzhak Rabin, Benyamin Netanyahou et Ehoud Barak, il définit une ligne de non retour.<o:p></o:p>
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Seconde possibilité : Olmert est réellement sincère. Pour des raisons qui lui sont propres, il mènera les négociations "de bonne foi", comme il a commencé cette semaine, pour aboutir à un accord. Dans le pays, une violente campagne de protestation sera lancée contre lui. La Knesset sera dissoute, de nouvelles élections auront lieu, Olmert prendra de nouveau la tête de la liste Kadima et gagnera en sa qualité de faiseur de paix. <o:p></o:p>
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Ou alors : il perdra ces élections. Il quittera alors la scène pour une cause honorable, non pas rejeté pour sa propre corruption mais en se sacrifiant sur lautel de la paix. <o:p></o:p>
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Autre hypothèse encore : le procureur général le mettra en accusation quoiquil arrive, il démissionnera mais rentrera chez lui la tête haute en tant que dirigeant auteur dune initiative historique. Le procureur général apparaîtra comme un saboteur de la paix et peut-être même comme la cause dune autre guerre. <o:p></o:p>
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QUESTION PERTINENTE : si Olmert a réellement opté pour la "fuite en avant", pourquoi la fuite vers la paix et non vers la guerre ? Cest ce qui arrive habituellement : des dirigeants au bord du gouffre préfèrent engager une petite (ou quelquefois une grande) guerre. Il ny a rien de tel quune guerre pour distraire lattention, et déclarer la guerre est presque toujours plus populaire, au moins au début, que de faire la paix. <o:p></o:p>
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Ici, il y a aussi deux possibilités : <o:p></o:p>
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La première : Olmert, comme Paul, a eu une révélation et il est réellement devenu un homme de paix. Le démagogue nationaliste a mûri et comprend maintenant que lintérêt national exige la paix. Un cynique éclatera de rire. Mais des choses plus étranges se sont produites sur le chemin de Damas. <o:p></o:p>
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La seconde : Olmert estime que l'opinion publique israélienne préfère la paix avec la Syrie à la guerre avec la Syrie et il espère gagner quelque popularité en tant que faiseur de paix. (Je pense que cest effectivement le cas)<o:p></o:p>
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La troisième : Olmert sait que tous les chefs de l'establishment sécuritaire (à l'exception notable du patron du Mossad) sont partisans de la paix avec la Syrie en fonction de froids calculs stratégiques. Aux yeux de létat-major général de larmée, la perte des Hauteurs du Golan est un prix raisonnable à payer pour séparer la Syrie de lIran et réduire son soutien au Hezbollah et au Hamas, en particulier si une force internationale y est déployée après quelles seront redevenues les "Hauteurs syriennes". <o:p></o:p>
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La Syrie est un pays sunnite, même sil est gouverné par des membres de la petite secte alaouite qui est plus proche du chiisme. (Les alaouites tiennent leur nom dAli, le gendre du prophète, que les chiites considèrent comme son héritier légitime.) Lalliance entre la Syrie sunnite et laïque et lIran chiite orthodoxe est un mariage de convenance, dépourvu de toute base idéologique. Lalliance avec le Hezbollah chiite est fondée aussi sur des intérêts : comme la Syrie nose pas attaquer Israël pour récupérer les Hauteurs du Golan, elle soutient le Hezbollah en tant qu'intermédiaire. <o:p></o:p>
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TOUT CECI se produit sans limplication des Américains. Là aussi il y a des précédents : linitiative de Sadate en 1977 fut préparée dans le dos des Américains (comme lambassadeur américain au Caire à lépoque me la dit plus tard). Linitiative dOslo aussi mûrit sans la participation des Américains. <o:p></o:p>
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Jusquà récemment, les États Unis se sont opposés à tout dégel des relations entre les Israéliens et les Syriens et aujourdhui encore ils la considèrent avec méfiance. Dans la vision de cow-boy qua Georges Bush du monde, la Syrie appartient à "lAxe du mal" et doit être isolée. <o:p></o:p>
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Ceci apporte du grain à moudre à John Mearsheimer et Stephen Walt, les deux professeurs américains qui doivent visiter Israël le mois prochain. Leur livre provocateur affirme que le lobby pro-israélien domine complètement la politique étrangère américaine. Dans ce nouveau développement, il semble vraiment que Jérusalem a amené Washington sur ses positions. <o:p></o:p>
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Au cours de sa visite à Jérusalem il y a quelques jours, Bush a dénoncé le fait de parler à des ennemis. Cela a été interprété comme un reproche à Barak Obama qui a annoncé son intention de parler aux dirigeants de lIran. Il est possible quOlmert parie déjà sur lentrée dObama à la Maison Blanche. <o:p></o:p>
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Mais Bush nest pas encore un homme fini. Il lui reste encore huit mois à gouverner et lui aussi pourrait en venir à la conclusion quil devrait opter pour "la fuite en avant". Dans son cas : en attaquant lIran. <o:p></o:p>
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COMMENT tout cela va-t-il affecter la mère de tous les problèmes, le cur du conflit israélo-arabe : la question de la Palestine ? <o:p></o:p>
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Menachem Begin a conclu une paix séparée avec lÉgypte et lui a restitué la totalité de la péninsule du Sinaï afin de consacrer toute son énergie à la guerre contre les Palestiniens. Sans aucun doute, Begin était prêt à procéder de la même façon sur le front syrien. Selon la carte quutilisait Vladimir (Zeev) Jabotinsky, avec laquelle Olmert a été éduqué, le Golan, pas plus que le Sinaï, ne fait partie de Eretz Israël. <o:p></o:p>
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Une paix séparée recèle de grands dangers pour les Palestiniens. Si le gouvernement israélien arrive à un accord de paix avec la Syrie (et ensuite avec le Liban), il sera en paix avec tous les États voisins. Les Palestiniens seront isolés et le gouvernement israélien pourra leur imposer ses volontés. <o:p></o:p>
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Contre ce danger, une perspective positive existe : quaprès lévacuation du Golan, il y ait une pression accrue, interne et externe, pour réaliser la paix avec les Palestiniens aussi, une paix durable. <o:p></o:p>
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Les colons du Golan sont bien plus populaires en Israël que leurs homologues de Cisjordanie. Alors que les colons d'Ofra et dHébron sont considérés comme des religieux fanatiques, dont le comportement insensé est tout à fait étranger à la mentalité israélienne, les colons du Golan sont considérés comme "des gens comme nous". Dautant plus quils ont été envoyés là-bas par le parti travailliste. Si les colons du Golan sont évacués, il sera beaucoup plus facile de soccuper de la foule de colons de "Judée et Samarie". <o:p></o:p>
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En étant en paix avec tous les États arabes, la population israélienne pourrait se sentir plus en sécurité et de ce fait plus disposée à prendre des risques en faisant la paix avec le peuple palestinien. <o:p></o:p>
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Le climat international changera aussi. Si le fantasme de l'"Axe du mal" disparaît avec Georges Bush, et que de nouveaux dirigeants américains font de sérieux efforts pour réaliser la paix, loptimisme osera de nouveau relever sa tête meurtrie. Il y a des gens qui rêvent dun partenariat entre Barack Obama et Tzipi Livni. <o:p></o:p>
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Tout ceci appartient à l'avenir. Entre temps, nous avons un Olmert faible qui a besoin dune initiative forte. Dans la légende biblique, le héros Samson tua un jeune lion, et lorsquil revint plus tard vers lui, "voici quil y avait un essaim dabeilles et du miel dans sa carcasse". Samson proposa une énigme aux Philistins : "Du fort est sorti de la douceur", et personne ne fut capable de trouver la réponse (Juges, 14) <o:p></o:p>
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Maintenant, nous pouvons poser la question : "Le faible apportera-t-il de la douceur ?"<o:p></o:p>
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