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Par demhaitam le 20 Décembre 2006 à 17:14
Préparatifs non dissimulés de guerre nucléaire
Le texte ci-dessous est la traduction dun extrait de «The Criminality of Nuclear Deterrence. Could the U.S. War on Terrorism go Nuclear?», de Francis Boyle, paru en 2002. Lauteur y montre que la «guerre contre le terrorisme» repose sur un tissu de mensonges et que les projets de guerre nucléaire du gouvernement américain sont criminels.
Depuis les événements du 11-Septembre, le peuple américain a vraisemblablement reçu de son gouvernement plus de vérités que jamais auparavant. Pendant lère post-vietnamienne, lorsque furent finalement révélés les programmes dassassinats Phoenix, lindignation fut suffisamment vive pour quune commission sénatoriale, le Church Committee, mène une enquête et quon condamne par la suite les assassinats perpétrés à létranger. Mais au cours de la dernière décennie et surtout sous le gouvernement Bush fils, des projets dassassinats à létranger, des efforts pour renverser les dirigeants dautres Etats souverains ou envahir un certain nombre de pays non spécifiés peuvent être révélés par des quotidiens qui reproduisent les propos de personnalités élues. Le ministre de la Défense Donald Rumsfeld peut appeler à larrestation de suspects «morts ou vivants» ou même «de préférence morts» ce qui éviterait opportunément les problèmes légaux posés par la nécessité dapporter des preuves de la responsabilité de Ben Laden ou le risque dêtre confronté à une série dirrégularités juridiques ou de méfaits commis par les Américains, en particulier par la CIA. Même lInternational Herald Tribune, dans ses efforts pour convaincre le lectorat européen de la nécessité de la guerre de longue durée menée par les Etats-Unis contre Al-Qaïda a révélé que Clinton, qui est relativement plus modéré, avait signé trois notes ultra-confidentielles autorisant à tuer plutôt quà capturer Ben Laden, à tuer également un certain nombre de lieutenants importants dAl-Qaïda et à abattre en vol des appareils privés de laviation civile.
Par conséquent, on ne devrait pas sétonner, au vu de ce matraquage de révélations sur une realpolitik machiavélique, que la stratégie américaine de dissuasion nucléaire, autrefois dissimulée, soit dévoilée grâce à des propos quasi impromptus comme ceux de lomniprésent Secrétaire adjoint à la Défense Wolfowitz publiés dans lédition du 9 janvier 2002 du New York Times: «Nous envisageons une transformation de notre politique de dissuasion. Il faudrait passer de forces presque exclusivement nucléaires et offensives à des forces aussi bien défensives quoffensives comprenant des potentiels classiques aussi bien que des potentiels nucléaires et impliquant une réduction du potentiel nucléaire.»
Au moins, cétait honnête. Il admettait que lactuelle pratique américaine de «dissuasion» nucléaire est en fait fondée presque exclusivement sur des forces nucléaires offensives». Je le répète, le Secrétaire adjoint à la Défense a admis que «presque» toutes les forces nucléaires américaines sont en réalité «offensives» et non «défensives». Une fois de plus cette déclaration pourrait faire lobjet, auprès de la Cour internationale de Justice, dune plainte contre le gouvernement américain pour aveu contraire aux intérêts du pays, Wolfowitz agissant dans le cadre de ses fonctions officielles. Naturellement, le Mouvement pacifiste et lopinion américaine informée savait que cela était vrai. Toutefois, il faudrait considérer cela comme le signe inquiétant dune époque où le Pentagone est devenu assez culotté pour admettre publiquement la criminalité nucléaire américaine envers le monde entier.
Prostitution de lOTAN
Pour faire avancer sa recherche dune pseudo-légitimation de la guerre, lAdministration Bush fils sest également rendue au quartier général de lOTAN à Bruxelles pour obtenir son soutien quant à lusage de la force. LOTAN a alors invoqué larticle 5 du Pacte atlantique. Or cet article ne concerne que les agressions armées dun ou plusieurs Etats contre un ou plusieurs Etats membres de lOTAN. Il na jamais été prévu pour le cas dune attaque terroriste.
LOTAN a été créé en tant que pacte défensif collectif conformément à larticle 51 de la Charte des Nations unies qui reconnaît le droit de légitime défense individuelle ou collective dans le cas de lagression armée dune nation contre une autre. Théoriquement, le Pacte atlantique était destiné à répondre à une attaque dun ou de plusieurs Etats membres de lOTAN par un ou plusieurs Etats membre du Pacte de Varsovie, en particulier lUnion soviétique. Mais après la dissolution du Pacte de Varsovie et leffondrement de lUnion soviétique, il ny avait plus de véritable raison de conserver lOTAN.
Dans ses efforts pour maintenir lAlliance atlantique, Bush père essaya de la modifier de manière à ce quelle serve à de nouveaux objectifs: 1) maintenir lordre en Europe de lEst, et 2) intervenir militairement au Moyen-Orient pour sécuriser les champs pétrolifères et gaziers. Le Conseil de lOTAN approuva la transformation bushiste dun pacte légal de défense collective en un pacte illégal dinterventions offensives.
Cela rappelle le Pacte Ribbentrop-Molotov de 1939 qui fut linévitable signe avant-coureur de linvasion de la Pologne par Hitler, qui signa le début de la Seconde Guerre mondiale.
Une génération plus tard, Bush père posa les fondements politiques de la guerre illégale de lOTAN contre la Serbie à propos du Kosovo en 1999 sous le commandement criminel de Bill Clinton. La Serbie na jamais attaqué un membre de lOTAN. Cest plutôt le contraire qui est vrai. LOTAN a attaqué la Serbie sans laval du Conseil de sécurité. Mais cest ce que Bush père et Clinton entendaient par maintenir lordre en Europe de lEst.
Le principal problème juridique consiste ici dans le fait que le Pacte atlantique nautorise pas du tout cela et devrait être amendé par les parlements des Etats membres pour justifier aussi bien ces interventions en Europe que celles au Moyen-Orient. De plus, chaque mission offensive de lOTAN devrait obtenir laval du Conseil de sécurité au cas par cas, comme le demande larticle 53 de la Charte des Nations unies. Bush père et Clinton voulaient tout simplement posséder un instrument utile pour des interventions militaires offensives collectives sous le contrôle prédominant des Etats-Unis qui donnerait un vernis ténu de multilatéralisme à la propagande menée aux Etats-Unis et à létranger tout en évitant lautorité de surveillance du Conseil de sécurité voulue par la Charte des Nations unies. La même chose est valable pour les alliés de Bush fils en ce qui concerne leur prostitution de lOTAN après le 11-Septembre.
Juste après, Bush fils sengagea dans la voie illégale tracée pour lui par Bush père et Clinton. Linvocation par Bush fils de larticle 5 du Pacte atlantique navait aucun sens. Cest une ironie du sort, mais une chose peu surprenante que les Etats-Unis, qui prétendaient mettre sur pied lOTAN afin de «protéger» lEurope contre une attaque militaire de lUnion soviétique soient devenus les premiers bénéficiaires de linvocation par lOTAN de larticle 5. Celui qui paie les pipeaux commande la musique. Comme le gouvernement Clinton le reconnaissait pendant sa guerre illégale contre la Serbie, les USA sont lOTAN. Ce paradoxe apparent peut être résolu si lon comprend que la vraie raison pour laquelle les Etats-Unis ont recouru à lOTAN était avant tout dassurer à lAmérique sa domination sur le continent européen. Cest encore le premier objectif de lOTAN, même si lEurope sefforce de mettre sur pied ses propres forces armées en vue dune défense collective.
Croisade de Bush fils
Aujourdhui, les Etats membres de lOTAN sont déjà enrôlés dans la guerre sainte de Bush fils contre le terrorisme international en Afghanistan, en Somalie et dans dautres pays arabes et musulmans. Nous sommes témoins dune nouvelle croisade, comme au Moyen Age, menée par les puissances coloniales blanches, européennes et chrétiennes contre 1,2 milliard de musulmans organisés en quelque 58 pays dont la plupart sont ou sont considérés comme des populations de couleur selon loptique raciste européenne et qui se trouvent posséder légalement les très importantes ressources en pétrole et en gaz du Moyen-Orient, dAsie centrale et du Sud-Est asiatique dont lOccident a tellement besoin. Voilà ce qui se passe. Et si vous avez encore des doutes, rappelez-vous que cest Bush fils lui-même qui a appelé publiquement «croisade» cette guerre sainte contre le terrorisme international.
Evidemment, le monde musulman sait tout à propos des croisades et des croisés occidentaux. Le «choc des civilisations» prophétisé par mon confrère de Harvard Samuel Huntington a été vivement débattu en Occident alors que la riposte iranienne demandant un «dialogue entre les civilisations» est passée inaperçue. Le monde musulman a assisté récemment à une importante extermination de musulmans par les croisés occidentaux en Bosnie, en Tchétchénie, en Irak, en Palestine, au Liban et maintenant en Afghanistan. Cest comme si le script du Nouvel ordre mondial des deux Bush avait été emprunté au «Choc des civilisations» de Huntington. De manière sinistre, cet ouvrage volumineux se termine par une guerre catastrophique entre les Etats-Unis et la Chine qui rappelle lhostilité imprudente du gouvernement Bush fils à légard de la République populaire de Chine au début de son mandat.
Negroponte, ambassadeur de la mort
En sadressant à lOTAN, ladministration Bush fils essayait dobtenir une sorte de légitimation internationale pour une guerre contre lAfghanistan après avoir échoué à lobtenir du Conseil de sécurité. Elle fit une seconde tentative au Conseil de sécurité mais tout ce quelle put obtenir, cest une déclaration du Président qui navait aucune valeur légale. Ensuite, elle fit une troisième tentative et obtint un langage plus net mais il faut y insister car on na pas bien fait comprendre la position des Nations unies aux Américains elle a encore échoué à décrocher la moindre autorisation de recourir à la force des armes pour quelque raison que ce soit, et surtout pas contre lAfghanistan, membre des Nations unies.
Alors le nouvel ambassadeur américain auprès des Nations unies, John Negroponte, envoya une lettre au Conseil de sécurité dans laquelle était invoqué larticle 51 de la Charte des Nations unies. Certains dentre nous, au sein du Mouvement pacifiste, connaissent bien Negroponte qui était ambassadeur des Etats-Unis au Honduras pendant la guerre menée contre les terroristes contras au Nicaragua par Reagan/Bush. Il a sur les mains le sang denviron 35 000 civils, à peu près 10 fois le nombre des victimes de lattaque terroriste du 11-Septembre. Aussi le seul moyen dont Bush disposait pour faire approuver sa nomination par le Sénat fut de le catapulter juste après les attaques du 11-Septembre: autre exploitation machiavélique de cette terrible tragédie nationale. En hommage involontaire à Orwell, le gouvernement Bush fils a choisi Negroponte pour donner un cours au monde entier, via les Nations unies, sur le terrorisme international, sujet dont il est un spécialiste reconnu grâce à sa grande expérience personnelle.
La conception nazie de la légitime défense refait surface
Etant donné les antécédents de Negroponte, sa lettre au Conseil de sécurité ne fut pas une surprise. Elle disait en gros que les Etats-Unis se réservaient le droit duser de la force en état de légitime défense contre tout Etat sur lequel le gouvernement Bush fils jugerait personnellement nécessaire dexercer des représailles dans le cadre de sa guerre sainte contre le terrorisme international. Peu après, un journaliste de la San Fransisco Chronicle ma demandé sil existait des précédents de la position radicale défendue par Negroponte selon laquelle les Etats-Unis se réservaient le droit de faire la guerre en état de légitime défense à 30 ou 60 autres Etats quils seraient seuls à désigner. Je lui ai répondu quil existait un précédent extrêmement malheureux enregistré au Procès de Nuremberg en 1946.
Il était choquant mais non surprenant de voir que Negroponte, responsable dun véritable génocide, avançait un argument semblable à celui avancé par les défenseurs des criminels de guerre nazis devant le Tribunal de Nuremberg quant à la non-applicabilité du Pacte Kellogg-Briand de 1928. Celui-ci avait rejeté lidée que la guerre pouvait être un instrument de politique nationale. Larticle premier stipulait que «les Hautes Parties contractantes déclarent solennellement au nom de leurs peuples respectifs quelles condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux, et y renoncent en tant quinstrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles.» Cependant, en signant le Pacte, lAllemagne avait formulé une réserve selon laquelle elle se gardait le droit de faire la guerre en état de légitime défense si elle le jugeait bon.
Ainsi quand, en 1945, les criminels de guerre nazis furent poursuivis pour crimes contre la paix sur la base du Pacte Kellogg-Briand, ils soutinrent que la Seconde Guerre mondiale était une guerre que le gouvernement allemand estimait mener en état de légitime défense et que le Tribunal était par conséquent incompétent pour en décider autrement en raison de la réserve émise par lAllemagne. Inutile de dire que le Tribunal rejeta cet argument ridicule et que, plus tard, il condamna à mort plusieurs criminels de guerre notamment pour crimes contre la paix. Aussi bien les Etats-Unis que lAfghanistan sont parties au Pacte Kellogg-Briand. Larticle 6a du Statut de la Cour de Nuremberg définit les «crimes contre la paix» de la façon suivante:
a) Les crimes contre la paix: cest-à-dire la direction, la préparation, le déclenchement ou la poursuite dune guerre dagression, ou dune guerre de violation des traités, assurances ou accords internationaux, ou la participation à un plan concerté ou à un complot pour laccomplissement de lun quelconque des actes qui précèdent;
La guerre de Bush fils contre lAfghanistan, en violation du Pacte Kellogg-Briand de 1928 et de la Charte des Nations unies de 1945, constitue un crime contre la paix au sens défini par le Statut du Tribunal de Nuremberg. Cest un exemple flagrant des raisons pour lesquelles le Pentagone et Bush fils se sont si vigoureusement opposés à létablissement dune Cour pénale internationale.
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