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Par demhaitam le 21 Octobre 2006 à 21:24
La Honte de lAmérique, deux ans
après la déclaration de
« Mission Accomplie »
par Robert Fisk
Deux ans après la déclaration de « Mission Accomplie », quelque stature morale à laquelle pouvaient encore prétendre les États-Unis à la fin de linvasion de lIrak a été depuis longtemps dilapidée par la torture, les abus et les morts dAbou Ghraïb. Que le symbole de la brutalité de Saddam Hussein ait pu être transformé par ses ennemis en un symbole de leur propre brutalité est une épitaphe singulièrement ironique de toute laventure en Irak. Nous avons tous été contaminés par la cruauté des interrogateurs, des gardes et des directeurs de prisons.
Mais mon propos va au-delà dAbou Ghraïb. Il y a maintenant des connexions claires et avérées entre les abus dAbou Ghraïb, la cruauté découverte à la prison des Américains à Bagram en Afghanistan et au camp de Guantanamo. Bizarrement, le général Janis Karpinsky, le seul officier supérieur US qui soit mis en accusation pour Abou Ghraïb, ma avoué, il y a un an alors que je visitais la prison, quelle avait été à Guantanamo, mais quà Abou Ghraïb, elle navait pas été autorisée à assister aux interrogatoires - ce qui semble très étrange.
De nombreuses preuves ont été accumulées concernant le système mis en place par les Américains pour maltraiter et torturer des prisonniers. Jai interviewé un Palestinien qui ma fourni des preuves irréfutables de viol anal pratiqué avec des bâtons de bois à Bagram - par des Américains, pas par des Afghans.
Un nombre grandissant des témoignages qui nous parviennent de Guantanamo - lhumiliation sexuelle des prisonniers musulmans, enchaînés à des chaises sur lesquelles ils défèquent et urinent, lutilisation de pornographie pour pousser les musulmans à se sentir impurs, les interrogatrices peu vêtues (ou, dans un cas, faisant semblant de barbouiller la figure du prisonnier avec son sang menstruel) - sont corroborés. Des Irakiens que jai pu questionner longuement au cours de plusieurs heures parlent avec beaucoup de franchise de corrections terrifiantes données par des interrogateurs militaires et civils, pas seulement à Abou Ghraïb, mais aussi dans dautres bases US en Irak.
Au camp américain à côté de Falloujah, les prisonniers sont frappés avec des bouteilles en plastique pleines deau ; en se cassant, elles coupent la peau. À Abou Ghraïb, les chiens de la prison ont été utilisés pour intimider et mordre les prisonniers.
Comment cette culture sordide a-t-elle commencé dans la « guerre contre la terreur » de lAmérique ? Linjustice institutionnalisée dont nous avons été témoins dans le monde entier, les abominables « restitutions » américaines par lesquelles les prisonniers sont transférés dans des pays où ils peuvent être rôtis, électrifiés, ou, en Ouzbékistan, rissolés vivants dans de lhuile ? Comme lécrivait Bob Herbert dans le journal The New York Times, ce qui semblait incompréhensible quand les premières images ont émergé dAbou Ghraïb, semble maintenant routinier, voire typique, des abus qui « imprègnent les opérations de ladministration Bush ».
Amnesty, dans un document terrifiant de 200 pages datant doctobre, retrace la diffusion des rapports de Donald Rumsfeld à propos du système dinterrogation des prisonniers et les autorisations à mots couverts du recours à la torture. En août 2002, par exemple, quelques mois seulement après que Bush a fait son discours sous une bannière proclamant « Mission Accomplie », un rapport du Pentagone affirmait qu« afin de faire respecter lautorité constitutionnelle du Président à gérer la campagne militaire, [la loi américaine interdisant la torture] doit être considérée comme étant inapplicable dans le cas dinterrogatoires entrepris en accord avec lautorité du Commandant en chef. » Que peut-on y voir dautre quune autorisation de Bush à utiliser la torture ?
Un rapport du Pentagone de 2004 utilise des termes choisis pour permettre aux interrogateurs dutiliser la cruauté sans crainte de poursuites pénales : « Même si le fonctionnaire sait que ses actions vont entraîner une vive douleur, si le fait dinduire de la douleur nest pas son objectif principal, on ne peut pas lui attribuer lintention spécifique requise [pour être coupable de torture], même si celui qui interroge na pas agi de bonne foi. »
Lhomme qui a systématisé les séances de torture à Abou Ghraïb était le Major Général Geoffrey Miller, le commandant de Guantanamo qui est allé à Abou Ghraïb pour y « Gitmo-iser lopération de détention » [« Gitmo » est un diminutif de Guantanamo]. Il sen est suivi une utilisation accrue dentraves douloureuses et de fréquentes mises à nu forcées des détenus. Le rapport du Major Général Miller suite à sa visite en 2003 évoquait la nécessité davoir à Abou Ghraïb une force de surveillance qui « mette en place les conditions nécessaires au succès des interrogations et à lexploitation des internés ou détenus ». Selon le Général Karpinski, Major Général Miller a dit que les détenus « sont comme des chiens, et si vous leur laissez croire quils sont mieux quun chien, vous en avez perdu le contrôle ».
Les prisons qui parsèment maintenant lIrak sont un symbole honteux, non seulement de notre cruauté, mais aussi de notre échec à créer des circonstances favorables à lémergence dun nouvel Irak. Vous pouvez organiser des élections et créer un gouvernement, mais, quand cette peste militaire est autorisée à se répandre, tout le sens de la démocratie est perdu. Le « nouvel » Irak va apprendre comment traiter ses prisonniers dans ces centres dinterrogatoires, et inévitablement, les « nouveaux » Irakiens vont prendre en charge la prison dAbou Ghraïb et lui redonner le rôle quelle avait sous Saddam, et toute justification pour linvasion (ou du moins la justification officielle) sera perdue.
Avec une insurrection de plus en plus violente et incontrôlable, la vacuité de la vantardise ridicule de Bush est évidente. La vraie mission, il semble, était dinstitutionnaliser la cruauté des armées occidentales, nous marquant à jamais de lignominie dAbou Ghraïb, Guantanamo et Bagram - sans parler des prisons secrètes que même la Croix-Rouge nest pas autorisée à visiter et où lon ne peut pas savoir quelle dépravation a lieu. Je me demande quelle est notre prochaine « mission à accomplir » ?
Dix jours sanglants en Irak : 338 morts, 588 blessés
Jeudi 28 avril
Lexplosion dune bombe placée au bord dune route tue quatre soldats américains et en blesse deux. Deux autres soldats américains meurent dans un accident. Cinq Irakiens sont tués dans des attaques.
Vendredi 29 avril
Dix-sept bombes, dont quatre attentats-suicides en presque autant de secondes à Azamiyah, et 13 voitures piégées dans la région de Bagdad, tuent au moins 50 personnes, incluant deux soldats US, et blessent 114 Irakiens et sept Américains.
Samedi 30 avril
Onze attentats à la voiture piégée, au moins deux attaques à la bombe sur la chaussée et plusieurs tirs de roquettes, attaques au mortier et embuscades. Cinq attaques à la voiture piégée à Bagdad, six autres à Mossoul, dont la pire, une bombe cachée dans une mosquée, tue une femme et deux enfants. Un total de 17 Irakiens et un Américain sont morts et 32 sont blessés.
Dimanche 1er mai
Un attentat à la voiture piégée visant des personnes assistant à des funérailles près de Mossoul tue environ 30 personnes et en blesse environ 50. Cinq policiers irakiens sont tués à un point de contrôle ; 4 meurent et 12 sont blessés par une voiture piégée à Bagdad ; et une personne est tuée, deux sont blessées par une bombe dans le parc dattraction de Bagdad. Dautres attaques tuent un Irakien et en blessent 24. Cinq Américains sont blessés par six autres voitures piégées à Bagdad. Un civil australien est pris en otage.
Lundi 2 mai
Trois voitures piégées à Bagdad tuent neuf personnes, une attaque suicide à Mossoul tue un enfant, blesse 15 autres personnes. Un soldat britannique est tué par une bombe sur la chaussée, cest le 83e mort anglais depuis mars 2003. Dans le nord, une voiture piégée tue une femme et en blesse quatre. Deux soldats US sont blessés par une bombe sur la route à Mossoul. Un soldat US meurt, deux sont blessés par une autre bombe sur la route. Deux avions F/A-18 Hornet US sécrasent, tuant les deux pilotes.
Mardi 3 mai
Deux soldats bulgares meurent dans un accident de la route. Une fusillade à Ramadi tue 12 insurgés, un soldat irakien et deux civils, et en blesse huit, dont une petite fille. Deux soldats US meurent dans des explosions sur la route.
Mercredi 4 mai
Soixante Irakiens meurent, 150 sont blessés, lorsque la bombe dune attaque-suicide explose dans la ville kurde dArbil. Une bombe tue 15 personnes et en blesse 16, dont 10 civils, à Bagdad. Un mort et deux blessés dans une fusillade à Bagdad.
Jeudi 5 mai
Un attentat suicide contre un centre de recrutement pour larmée à Bagdad tue 13 personnes et en blesse 18. Une voiture piégée tue 4 policiers irakiens à Mossoul et en blesse cinq. Des tireurs en embuscade attaquent un convoi policier, en tuent 10 et en blessent deux. Une voiture piégée tue une personne, en blesse six.
Vendredi 6 mai
Une attaque suicide à la voiture piégée frappe un marché de légumes du sud, tuant 31 personnes et en blessent 45. Une autre attaque tue huit policiers à Tikrit. Les corps de 12 hommes, habillés en civil et portant des bandeaux sur les yeux, sont découverts à Bagdad.
Samedi 7 mai
La bombe dune attaque suicide à la voiture explose, tuant 22 et blessant environ 35 personnes. Un soldat US est tué et quatre autres corps sont découverts dans des charniers. Deux hommes exécutés sont trouvés à Ramadi.
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