•          Le retrait d’Irak selon Bush : 20 000 soldats

                                    supplémentaires ?

     

    Des informations ayant filtré de la Maison-Blanche évoquent, comme préalable à un retrait d’Irak, un renfort massif pour sécuriser Bagdad.

    Si la Maison-Blanche accepte désormais la nécessité de mettre en oeuvre une nouvelle stratégie en Irak alors qu’elle s’entêtait jusqu’aux élections du 7 novembre à « maintenir le cap jusqu’à la victoire », elle hésite, de toute évidence, sur les choix qu’il conviendrait désormais de privilégier. George W. Bush devrait tenir compte d’une manière ou d’une autre du rapport du groupe d’études sur l’Irak présenté au début de ce mois par James Baker, l’ex-secrétaire d’État de l’administration de son père.

    Il pourrait toutefois jouer de son statut de commandant en chef pour « adapter », voire ignorer certaines des recommandations de la commission parlementaire bipartite. Ainsi a-t-il multiplié lui-même ou par l’intermédiaire de sa secrétaire d’État, Condoleezza Rice, les déclarations hostiles à l’ouverture de discussions « directes » avec Damas ou Téhéran. Quant à l’éventuel retrait progressif des troupes que préconise le rapport Baker pour début 2008, son succès ne serait garanti, aux yeux de George W. Bush, qu’en en passant d’abord par une phase de... renforcement du contingent sur place d’au moins 20 000 soldats.

    Selon l’édition de samedi du New York Times, le président aurait en effet demandé à des experts militaires et à des financiers de la Maison-Blanche de lui présenter des scénarios pour l’envoi de nouvelles troupes. Le quotidien qui cite, sans les nommer, des hauts responsables de l’administration, estime que cette option d’un effort militaire supplémentaire gagne du terrain dans l’entourage de George W. Bush et laisse entendre qu’il pourrait arguer de la nécessité de sécuriser le pays avant d’envisager tout transfert de pouvoirs aux militaires irakiens.

    Les stratèges de l’équipe présidentielle vont jusqu’à envisager un déploiement de 50 000 soldats de plus. Toutefois ils font remarquer que les impératifs de recrutement et d’entraînement de ces militaires supplémentaires coûteraient très cher à Washington. Sachant que le coût de la guerre, estimé officiellement à quelque 500 milliards de dollars (en réalité bien plus de 1 000 milliards selon les calculs du prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz) pèse de plus en plus lourdement sur les déficits record du pays.

    Aujourd’hui quelque 135 000 soldats états-uniens sont stationnés en Irak mais seuls 17 000 sont chargés de sécuriser Bagdad. L’administration souhaiterait, selon le New York Times, que l’envoi d’un renfort d’au moins 20 000 hommes permette un doublement des forces stationnées dans cette ville. Avec l’espoir d’assurer ainsi au moins la sécurité dans la capitale. L’augmentation de la présence états-unienne en Irak serait atteinte, précise encore le journal, à la fois en accélérant les déploiements prévus et en différant le retour d’unités déjà stationnées sur place.

    La Maison-Blanche invoque en même temps la nécessité de consolider les forces irakiennes sur le terrain, ce qui serait, à ses yeux, le seul moyen d’envisager un retrait, à terme, des troupes états-uniennes. Bagdad semble avoir été enjoint par son puissant tuteur à agir selon cette cohérence en donnant au moins des signes de sa volonté de reconstituer une véritable force armée. Samedi, au démarrage d’une conférence dite de « réconciliation nationale », le premier ministre irakien, Nouri Al Maliki, a ainsi invité les anciens officiers de Saddam Hussein à rejoindre les rangs de la nouvelle armée du pays. Le geste, présenté comme un moyen de concilier la minorité sunnite (toute-puissante sous l’ancien dictateur), illustre aussi le souci de chercher à reconstituer une force militaire digne de ce nom, après que l’ossature de l’ex-armée irakienne a été systématiquement démantelée.

    Ce point-là de la nouvelle stratégie recherchée par la Maison-Blanche consistant à miser sur un « pouvoir fort » à Bagdad - capable d’assurer à terme, en lieu et place de l’armée US une relative stabilité -, pourrait avoir, sans problème, l’assentiment de la majorité démocrate du nouveau congrès qui siégera à partir de janvier. Le transfert des tâches sécuritaires correspond en effet aux recommandations du rapport Baker, qui présente tous les attributs d’un compromis sur l’Irak entre démocrates et républicains, selon une approche « pragmatique », privilégiée également par le nouveau secrétaire à la Défense, Robert Gates, qui entre en fonction aujourd’hui même en remplacement du néoconservateur, Donald Rumsfeld.

    Il reste que l’option d’un renforcement initial substantiel des troupes US sur le terrain, avancée par la Maison-Blanche, pourrait s’avérer bien difficile à « vendre » à une opinion publique de plus en plus persuadée, selon les sondages, que la guerre est un échec. Et si la nouvelle majorité démocrate est prête au compromis autour du plan Baker elle pourrait manifester de très fortes objections contre ce préalable-là. Tant il serait en contradiction avec les attentes exprimées il y a un peu plus d’un mois par les électeurs qui lui ont permis de remporter les scrutins du midterm.


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