• Rien de nouveau du côté de Rice

    En annonçant sa « nouvelle » politique en Irak, une politique en contradiction avec les conclusions de Baker-Hamilton, Bush a également envoyé la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice faire une tournée de la région pour rassembler des soutiens arabes.

    La politique moyen-orientale de l’actuelle administration des Etats-Unis est un énorme échec.

    Non seulement le ‘Nouveau Moyen-Orient » annoncé n’a pas vu le jour mais l’Irak, le pays conçu par Washington comme le pivot du changement démocratique dans la région, est au contraire devenu un champ de bataille chaotique qui coûte la vie à des milliers d’Irakiens et des dizaines d’Américains chaque mois.

    L’Irak est un bourbier où s’enfonce l’administration américaine, aussi cette région, toujours compliquée, devient de plus en plus difficile à gérer pour les Etats-Unis. En développant sa technologie nucléaire, l’Iran défie directement Washington. La Syrie exerce à divers niveaux son influence en Irak, au Liban et en Palestine. Le gouvernement libanais, soutenu par l’Occident, est confronté à une crise interne grave avec le Hezbollah. Le président palestinien, Mahmoud Abbas, qui est accepté en Occident, doit maintenant lutter avec un gouvernement formé par le Hamas, que l’Occident évite.

    Pendant ce temps, le gouvernement israélien craque sous la défaite subie au Liban l’an dernier et les accusations de corruption. Même les pays arabes modérés qui comptent sur le soutien des Etats-Unis se plaignent de l’incapacité de l’administration actuelle d’adapter sa politique aux complications de la région.

    La commission bi-partisane Baker-Hamilton, qui a été formée pour enquêter sur la politique moyen-orientale de l’administration, a fait des déclarations éreintantes. En contrepoint de la " sagesse" qui règne dans l’administration, le rapport affirme l’interconnexion des conflits et problèmes de la région et pointe du doigt la centralité de la solution du conflit Arabes - Israël.

    Alors que le Président George W. Bush n’a pas l’intention de suivre les recommandations du rapport, il ne peut non plus l’ignorer complètement. Aussi, en annonçant sa « nouvelle » politique en Irak, une politique en contradiction avec les conclusions de Baker-Hamilton, il a également envoyé la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice faire une tournée de la région pour rassembler des soutiens arabes.

    Et comme toujours quand les Etats-Unis ne savent plus quoi faire dans la région, le conflit israélo-palestinien a fait l’objet d’une nouvelle attention. Pas d’exception cette fois ci. La feuille de route, officiellement lancée il y a quatre ans a été complètement ignorée par l’ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon, et les Etats-Unis n’ont rien fait. Maintenant, tout d’un coup, Rice affirme son intérêt pour la remise en route de la feuille de route et elle se souvient que les Palestiniens souffrent et méritent de voir la fin de leurs souffrances dans un Etat à eux.

    Pourtant, malgré cette réminiscence soudaine, Rice n’avait rien de nouveau à offrir. Elle a rencontré Avigdor Liebermann, Tzipi Livni et Amir Peretz, a eu des discussions avec Abbas, est revenue rencontrer le Premier ministre israélien Ehud Olmert, a visité différentes capitales arabes et annoncé partout son désir de trouver une solution politique. Mais elle n’avait pas de plan. Elle est venue, a-t-elle dit, pour découvrir et écouter, mais la seule chose à découvrir, c’était l’augmentation du nombre de colonies israéliennes en Cisjordanie et encore plus de souffrance palestinienne.

    Néanmoins, en réponse à ses promesses d’intensifier ses efforts pour trouver une solution, elle a reçu le soutien espéré des Arabes à la « nouvelle » stratégie de Bush en Irak. Les pays arabes modérés ont brandi ses promesses pour justifier leur soutien constant à la politique des Etats-Unis. Ces « modérés » ont salué l’annonce faite par Rice d’un sommet à trois avec Abbas et Olmert dans les prochaines semaines, parce que ce qui leur importe c’est que ça change, même si ce n’est qu’une façade, ce qui promet une « possibilité positive » pour l’avenir.

    Y a-t-il vraiment dans l’attitude actuelle des Etats-Unis une « possibilité positive » d’arriver à une solution politique ? Si une « possibilité positive » cherche à mettre un terme à l’occupation israélienne et à établir un Etat palestinien sur les lignes de 1967 (avec des ajustements mineurs, objets d’un accord) et trouve une solution à la question des réfugiés conforme aux résolutions des Nations unies, alors oui. Mais cela n’entre pas dans le cadre de pensée de cette administration. Comme d’autres administrations avant, et peut-être davantage encore, cette administration est l’otage du point de vue israélien et s’adapte à ce que veut Israël.

    Actuellement, Israël veut un stade transitoire de longue durée. Il est sur le point de finir la construction du mur qui lui permet de conserver ce qu’il veut de la Cisjordanie et de laisser aux Palestiniens les morceaux surpeuplés. Ces restes prendront la forme d’un Etat temporaire contenu derrière ce mur. Si les Palestiniens et les Arabes acceptent cela, Rice continuera à faire la navette pour conclure « l’accord ». C’est la seule « possibilité positive » qu’elle a à offrir.

    Alors, est -ce que les Palestiniens et les Arabes devraient accepter cette solution « temporaire » ? Est-ce que c’est ce qu’on peut avoir de mieux ?

    Non, je ne crois pas. Les problèmes des Etats-Unis dans la région deviennent de plus en plus graves chaque jour. Si les Arabes sont unis, ils pourront obtenir mieux que cette offre israélienne minimale. Les Palestiniens et les Arabes doivent éviter les solutions transitoires. Ils doivent éviter de revenir à un processus de négociations dont le terme n’est pas fixé, qui est non séquentiel et contraignant.

    Il y a une alternative. Les Arabes en général et les Palestiniens en particulier doivent insister sur l’Initiative arabe comme base de tout processus de négociation et aussi sur un but final clair défini ensemble, dont tout le processus de négociation servira à préciser les stades et les mécanismes.

    Mais si les Palestiniens et les Arabes reprennent le même chemin dans la négociation qu’avant, Rice, Bush et Olmert les mèneront à nouveau en bateau. Ceci est malheureusement le scénario le plus probable et il sera utilisé pour transformer l’Etat « temporaire » en Etat permanent.


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